A chacun son opinion, vraiment ?

Entre ceux qui n’ont jamais d’opinion sur rien et les autres qui ont une opinion sur tout, chacun a bien sur le droit de donner son opinion, sur tout et n’importe quoi, et même sur rien.

Là où le bât blesse, c’est lorsque les personnes confondent une opinion avec un fait, une opinion avec une compétence.

  • Les synonymes d’une opinion sont : je donne mon avis, j’ai la conviction que, mon idée, ma croyance, mon jugement, ma pensée, mon point de vue est…
  • Un fait est une chose observable, un constat, un évènement qui se produit, une chose reconnue comme certaine et incontestable…
  • Une compétence est une capacité, une connaissance approfondie, une qualité, une aptitude à réaliser ou à expliquer, une maitrise d’une activité ou d’un art ou d’un métier ou d’une connaissance…

Or nous assistons en 2019 avec la crise sociale ( crise représentée par les gilets jaunes) à une démarche égalitariste, comme à l’époque révolutionnaire de 1789, qui mettrait sur un pied d’égalité toutes les paroles, entrainant confusion, désinformation, complotisme. Sous prétexte que les élites n’ont pas toujours raison, que le peuple n’a pas toujours tort, chacun donne son avis, son opinion, parfois excellente et brillante, parfois désastreuse et confuse, comme si les compétences des uns et des autres était annihilée sous prétexte que chacun a le droit au débat. Or, mettre toutes les idées sur un même pied d’égalité est une erreur, comme faire fi des compétences des uns et des autres.

Quand j’ai un avis argumenté sur tel joueur de l’équipe de France qui n’est pas sélectionné, je donne mon opinion en dehors de tout critère de compétence. Mon intérêt pour tel sport, ma passion pour le foot par exemple, me rend un fin connaisseur de ce sport, mais ne fait pas de moi un entraineur et sélectionneur compétent. Sinon, je pourrais alors postuler au poste d’entraineur national à la place de Didier Deschamps. Ce qui est impossible sans étude, sans diplôme, sans connaissance. Et c’est un leurre que de croire une seconde que je pourrais réussir.

 

Quand je dis que « les politiciens sont des manipulateurs incapables » ou « des hommes supérieurement intelligents », ce ne sont que des opinions qui n’engagent que ceux qui les prononcent, qui n’ont aucune valeur même si elles sont partagées par plusieurs personnes.

Quand je dis que l’attentat du World Trade Center n’a pas eu lieu, ceci relève du complotisme et de la réécriture historique.

Quand je dis que  l’Europe finance les pays de la CEE, ceci est un fait, qu’on soit d’accord ou pas. Quand je dis que la CEE met en place des règles pour chaque pays européen, ceci est un fait. Quand je dis que ces règles sont strictes et contraignantes, ceci est une opinion.

Quand je dis qu’un bon manager doit avoir une conscience de soi et une estime de soi pour un management performant, ceci est une compétence que je revendique et qui n’est pas contestable ou discutable.

Quand mon médecin me dit qu’il ne faut pas d’antibiotique sur ce mal, je peux contester et être en désaccord avec lui, mais cela ne fait pas de moi une personne compétente ni un médecin. J’aurai donc toujours tort même si je ne partage pas son diagnostic ou son point de vue, parce qu’il est compétent ( la seule limite serait alors son incompétence, qui est donc le contraire de la compétence).

Quand je dis qu’une bonne communication intègre une bonne intelligence émotionnelle, ceci est une compétence. Là aussi, chacun peut avoir un point de vue, contester, nier, adhérer, cela ne rend pas la personne qui s’oppose à ma compétence une personne compétente.

Alors à chacun son opinion, c’est un principe de liberté qui faut sauvegarder, débattons et échangeons nos idées, c’est la force d’une démocratie. C’est aussi sa faiblesse, quand l’intolérance et la bêtise viennent contredire les compétences des uns et des autres, sous prétexte d’un égalitarisme qui mettrait toute personne sur le même marchepied.

« Dans ce monde complexe, il est tentant de choisir, pour tout problème, une solution simple. Et même, plutôt, de profiter d’un problème, quel qu’il soit, pour proposer sa propre obsession comme une solution…..On part donc de moins en moins des problèmes pour trouver une solution, mais de plus en plus de la solution pour éclairer n’importe quel problème. Comme si les problèmes n’étaient qu’un prétexte anecdotique pour faire avancer une cause. »

Jacques Attali (président de la fondation Positive Planet) 

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